?, Édito

Novlangue

Ah, Ray Bradbury.

L’auteur de Fahrenheit 451 est réputé pour ses déclarations chocs. La dernière en liste n’est pas piquée des vers [à soie]. Elle n’est pas piquée des vers [à soie], car elle m’a choquée. « Choqué » dans le sens de « saisie », « frappé ».

Voici sa déclaration.

«Nous avons trop de téléphones portables, trop d’internet. On devrait se débarrasser de ces machines, il y en a trop aujourd’hui.».

Je ne veux pas me répandre en débattant au sujet de la surproduction. Il y a en effet, en ce moment,  surproduction de tout. Mais la surproduction est causée par la surconsommation, qui est causée par la publicité, qui est causée par le capitalisme. De là peut-être le besoin d’une « révolution aux États-Unis » dont parle Bradbury dans le même article.

Mais pourquoi sommes-nous à ce point terrifiés par la surproduction des technologies de communication? Serait-ce l’immémoriale peur de la domination par la machine? Pourquoi ne sommes-nous pas terrorisés par la surproduction de montres (merci Éric pour la comparaison)? Avec ces gargantuesques gammes de modèles de toutes sortes, de prix, de marques, de manières d’indiquer l’heure, il y aurait de quoi paniquer, non?

Cette peur vient sûrement, entre autres, du fait que les technologies de communication viennent jouer dans notre bouche. Elles sont comme le dentiste. Quand elles  jouent dans notre gueule, on jase différemment, et soudainement l’angoisse de perdre des dents nous saisie…  Ces technologies changent notre langage, donc nous nous sentons menacés. La peur de la « novlangue » de 1984 est juste là, entre une molaire inférieur et supérieur; une « langue 2.0 » simplifiée, souvent associée au langage SMS, serait anti-subversive, trop limitative. Mais est-ce réellement ce à quoi la surproduction des technologies de l’information nous condamne?

Je ne pense pas. J’ai l’impression que l’utilisation du langage SMS est justement une forme de subversion, un langage codé utilisé par des adolescents qui veulent se distinguer, se singulariser (et aussi économiser de l’argent). Plusieurs générations de jeunes qui ont vécu bien avant le web se sont adonnés à ce jeu. Le reste du problème de ce langage SMS en est un de système d’éducation. Si les jeunes écrivent mal, s’est la faute des professeurs et du système d’éducation, pas la faute d’Internet et/ou des cellulaires.

Mais je m’éloigne du sujet. La question est loin d’être vidée.

À suivre, donc…

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La rue en a ras-le-cul

Mario Roy, « chroniqueur » à La Presse, a écrit ce texte, le 30 juin dernier, au sujet de la contestation mais surtout au sujet de la casse qui a eu lieu dans le cadre des sommets du G20 et du G8.

Voici le courriel que je lui ai envoyé :

Bonjour Monsieur Roy,

En lisant votre article du 30 juin dernier, je me suis senti démuni.

Je suis ce qu’on pourrait qualifier de « jeune professionnel dans la mi-vingtaine ». Je travaille actuellement dans le domaine de l’édition, et je suis sorti de l’université il y a trois ans.

Je me suis senti démuni car j’ai milité au début des années deux milles, dans la tourmente de la contestation contre la ZLÉA et de la guerre en Irak. Le fait est que sur certains points, vous avez raison. La casse, dans l’état où nous la connaissons actuellement, ne sert absolument à rien. Elle va même souvent à l’encontre des objectifs contestataires.

Je me suis senti démuni parce que je suis contre la casse, mais que j’ai l’impression que mes options pour changer les choses en tant que citoyens sont de véritables coups d’épées dans l’eau. Je me suis impliqué en politique pendant cinq ans, et j’ai été dégoûté par l’arrivisme des politiciens et l’univers parallèle dans lequel ils vivent. J’ai fait parti de groupes de pressions, mais on se rend vite compte que la majorité des groupes sont en compétition les uns avec les autres dans des luttes corporatistes qui visent à récolter le plus de membership possible. Sans compter que les médias et le gouvernement n’accordent qu’une importante négligeable à ce genre de groupe, lorsqu’ils ne perturbent pas l’ordre public.

Comme citoyen québécois, je suis devant le fait accompli que je ne vivrai jamais dans le Québec dont je rêve. Mon Québec ne sera pas indépendant, ni plus humain, ni plus empathique envers les démunis et ne fera jamais passer l’Homme avant l’argent.

Mon Québec, c’est le Québec de Norbourg, de BCIA, du manque d’éducation moyen nié, de la dictature électorale des régions, de la montée de la droite, des médias qui cherchent à « toucher » le plus grand nombre en se faisant les « portes-voix » d’une opinion publique niaise et grégaire.

Nous vivons dans un pays qui refusera, par tous les moyens possibles,  ne serait-ce que de réformer la manière dont nous pratiquons le capitalisme. Je peux donc très bien comprendre que les gens qui veulent vivre autrement dans leur pays puisse être très en colère devant le cul de sac qui se dresse devant eux.

Nous ne sommes peut-être pas affamés, ni pauvres, ni malades, mais nous sommes désespérés idéologiquement.

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Je suis navré

Je trouve navrant que l’opinion publique soit quelque chose qui agit en fonction des personnes et non pas des idées. On a trop souvent tendance à juger les actions, pour par la suite créer des personnages. On les condamne parce qu’ils font une chose ou l’autre, et du coup la personne devient l’avatar d’une idée ou deux.

On parle de Nicolas Dickner comme d’une « bibitte à poils navrante« , on sert du « fuck you dinosaure » à Jean Larose. Je ne suis pas d’accord avec Jean Larose sur la majorité de ses idées, mais je suis aussi contre l’idée que le livre électronique soit une révolution, ou changera quoi que ce soit à la littérature.

Je reviens sur ma tentative de vouloir faire une guerre à la « classique » contre « moderne ». NOUS SOMMES NAVRANTS. Des étincelles fulminent dans les sous-sols d’église de la ville, la possibilité de reprendre le contrôle de notre littérature populaire n’a jamais été autant à notre portée, et nous nous pitchons des bombes incendiaires par la gueule du haut de nos tours phalliques. DÉBANDONS! Ils se passent des choses. Combien de temps perdrons-nous encore à débattre au sujet du livre électronique, pendant que les nouvelles technologies nous permettent de rejoindre nos lecteurs directement, que les réseaux sociaux nous permettent d’organiser des événements majeur d’édition et de distribution indépendantes, qui croissent à une vitesse exponentielle, de surcroît?  Que les échanges entre auteurs, lecteurs, éditeurs, artistes visuels et critiques n’ont jamais été aussi florissants (et je ne parle pas que virtuellement)? Ce gigantesque réseau qui est en train de se construire nous ouvre des possibilités exceptionnelles, et nous sommes là en train de nous engueuler à propos du e-book…

Et si, avec le e-book, on balançait les distributeurs, les diffuseurs et les transporteurs?

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Écrire, Édito, Notes

Je suis un cyborg

« Rien ne tourmente l’appétit du Collectif comme le Livre. Ça l’irrite spécialement, cet objet matériel, non électrique, dans quoi un solitaire peut s’absorber longtemps, en silence. C’est le village d’Astérix de l’Empire du Bien Google, l’exception scandaleuse d’un flux désuet à connexion psychique en différé sur les temps passés. » (source)

Le Collectif : Selon la critique-fiction de Larose, le cyber-espace serait comme « le collectif » du Borg, dans Star-Trek; une entité assimilant tout sur son passage, et niant l’individualité de l’Homme.  C’est plutôt l’analogie bancale de Larose qui assimile tout sur son passage, en mettant dans le même panier utilisateurs, créateurs, commentateurs et industriels. Je ne ferai pas l’apologie de la liberté d’expression que nous permet la publication numérique; c’est factuel. Nous ne sommes jamais obligés de nous plier à la volonté des gens qui commentent négativement nos billets. Bien au contraire. Souvent, ça nous force à approfondir notre prise de position, à chercher de nouveaux arguments pour défendre notre point de vue.

En parlant du Borg. Larose me l’avait sorti, en plein cours d’ailleurs : « Oui, j’aime la science-fiction, je suis un amateur de Star Trek ». Il s’était justement mis à parler du Borg. Tout porte à croire que c’est l’unique référence en la matière qu’il possède. On remarque ici une réaction typique de l’adepte de la terreur androïde…

Le fait est que je suis un cyborg. J’aime m’enfermer dans une pièce avec de l’encre et des piles de papier, d’ouvrages théoriques et de romans jaunissant.  Rencontrer des amis autour d’une quantité phénoménale d’alcool. Écrire une lettre. Faire l’amour et dire : « un autre grand roman qui ne s’écrira pas ». Conspuer la réforme de l’orthographe, admirer un vers de Miron, faire des blagues au sujet du lac Léman.

Mais je suis un cyborg.

Je suis un être de chair et de métal, de sang et de culture. J’aime sentir l’acide d’un livre vieillissant autant que l’acide des batteries de mon netbook ou de mon Ipod. J’aime me servir du « futur » pour voir et dire le passé et l’infinie continuité du présent.  J’utilise wikipédia, je cite des viédos youtube, je lis Gawkers et j’admire Balzac. Oui, c’est possible, Monsieur Larose, de ne pas avoir envie d’entrer dans une « classe »…

« Le livre irrite le collectif » : faux.  La plupart de mes collègues modernes sont d’accord pour dire que le livre électronique est une fausse invention, qui vient du haut et non du bas.  C’est une grande faute d’associer livre électronique (industrie, produit) et culture de la grille.

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Je vous gifle, messieurs

Je pense qu’il est temps.

Réouvrons l’arène de 1687, dépoussiérons les hallebardes des anciens contre les modernes!

En réponse à Jean Larose, Éric Samson, partisan des modernes, poste cet article .

J’ajouterais, en réponse à l’article de Jean Larose, qu’il est bien juvénille d’utiliser comme argument central d’une critique une rhétorique  basée sur la présomption d’une carence affective de la part des auteurs de blogues. Prendre la décision d’écrire et de publier, c’est de facto s’adresser au public, peu importe le support que l’on utilise. Si Monsieur Larose considère l’écriture comme un acte solitaire, qu’il cesse de publier. L’intervention du public a toujours fait partie de la littérature.

La docte Antiquité dans toute sa durée
À l’égal de nos jours ne fut point éclairée

(Charles Perrault, Le siècle de Louis le Grand.)

Je préfère le sang frais de la grille au sperme tiède des corridors d’«Universités».

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Édito, Notes

Avatar wrap up

Allé voir Avatar 3d hier.

Image intéressante : le public se met des lunettes afin de vivre de manière plus réaliste une histoire où des humains se branchent sur des extraterrestres à forme humanoïde afin de vivre de manière plus réaliste la vie des extraterrestres…

Très bon article au sujet du « complexe de l’élu » répété dans plusieurs films de science-fiction sur Gawker. Cette analyse du film fait la lumière sur l’habitude qu’ont les « blancs » (lire caucasiens/occidentaux) de faire des films où un homme blanc devient le sauveur d’une autre race, dans un élan de culpabilité post-colonial. C’est vrai. On peut analyser Avatar de cette manière. La chose qui m’agasse dans cet article est que l’auteur élabore sa réflexion dans une optique de conflit entre noir et blanc. Le titre de l’article est évocateur : « When will white people stop making movies like « avatar »? »

Le scénario d’Avatar est certainement marqué par un complexe de culpabilité occidental envers les premières nations, c’est manifeste. Ce réflexe un peu primaire de vouloir devenir le sauveur d’un peuple menacé est peut-être symptomatique d’une société qui ne sait plus comment vivre avec ce complexe, avec cette certitude qu’elle a commis l’irréparable.

Mais on peut aussi pousser l’analyse plus loin. Si, au-delà d’une dualité de race, notre complexe de culpabilité en était un dirigé directement vers notre espèce? C’est-à-dire la race humaine? Il est en effet possible de considérer Avatar comme un film faisant l’éloge de l’inhumain. La nature humaine y est dépeinte comme un abîme de souffrance où la corruption et l’avarice règnent en maîtres, et où les impératifs économiques priment sur la morale et/ou l’éthique. Le complexe de culpabilité à la base du scénario d’Avatar est donc peut-être bien plus profond; on aimerait bien devenir autre chose…

Alors on se met des lunettes 3d, pour se mettre dans la peau d’un humain qui devient inhumain.

Avatar n’est pas un grand film, mais c’est un bon divertissement d’où pointe un malaise profond plutôt intéressant.

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Petite histoire entourant une réédition

Le premier livre que je lance avec Ta Mère en janvier sera une réédition. Une réédition augmentée, réécrite, corrigée, mais tout de même une réédition. Le fait est que Sens uniques est un recueil de nouvelles qui est sorti pour la première fois en 2006, aux éditions Arion.

La maison d’édition venait d’être rachetée par un « homme d’affaires français », et celui-ci voulait rajeunir l’image de la boîte en lançant une nouvelle collection de science-fiction.  L’aventure fut agréable jusqu’à la sortie du livre, même si parfois les employés de l’entreprise avaient de la difficulté à se faire payer… (ce qui arrive un peu trop souvent, même dans les grosses maison d’édition…)

Finalement, peu de temps après le lancement du livre, l’imprimeur a fait saisir nos livres afin de se payer, et le diffuseur de Arion a arrêté de diffuser le livre, faute de paiements… Je n’ai jamais vu ne serait-ce que le coin d’un chèque de royautés.

Mais peu importe. Aujourd’hui, les éditions de Ta Mère, en plus de le remettre sur le marché, m’ont offert la chance de revoir un texte qui me tient à coeur et qui marque le début de mon aventure littéraire. Ça fait du bien parfois d’avoir l’impression de pouvoir revenir en arrière…  Merci Maman.

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